les « rageux » et « haineux » des réseaux sociaux

Cyberharcèlement de Mila: 4 à 6 mois de prison avec sursis pour 11 prévenus, une relaxe

Alexandra Gonzalez avec Ambre Lepoivremer. 7 juillet 2021, 9:48 AM

L’adolescente avait reçu des milliers de messages de haine après une vidéo polémique sur l’islam. Le tribunal de Paris a reconnu coupables de cyberharcèlement douze jeunes, un dernier a été relaxé.

Ils écopent de peines allant de 4 à 6 mois de prison avec sursis pour un « lynchage 2.0 ». Ce mercredi, le tribunal judiciaire de Paris a reconnu coupables de cyberharcèlement onze jeunes qui avaient envoyé des menaces et des messages de haine à Mila à la suite d’une vidéo polémique dans laquelle elle critiquait vigoureusement l’islam, en novembre 2020. Un autre prévenu a été relaxé, suivant ainsi les réquisitions du procureur de la République, et un autre a bénéficié d’une nullité de la procédure.

Les condamnés devront également verser 1500 euros chacun à Mila, pour les dommages et intérêts, ainsi que 1000 euros pour ses frais d’avocats.  

« La cour considère que le fait de poster un message malveillant sur un réseau social consiste à l’imposer à la victime », a énoncé le président de la chambre pour justifier son jugement, estimant que ces tweets s’apparentent à « une entreprise de harcèlement qui a eu un impact psychique et physique » sur Mila.

« Un avant et un après ce procès »

Le tribunal a par ailleurs rejeté la demande de non inscription au casier judiciaire. « Les utilisateurs des réseaux sociaux doivent comprendre que s’ils ne veulent pas que quelque chose se sache, le pseudonyme ne suffit pas, il ne faut pas le poster. Dans la rue, on s’interdirait d’insulter ou de menacer quelqu’un dont l’attitude et les propos nous déplaît. Il en va de même pour les réseaux sociaux. » 

Durant l’audience, très médiatisée, la cour a tenté de définir les contours de la liberté d’expression et du droit au blasphème, et mis en lumière la banalité du harcèlement en meute sur internet.  

« Il y aura un avant et un après ce procès. Nous sommes en train de poser les règles de l’acceptable et de l’inacceptable », avait prévenu le président de la 10e chambre correctionnelle, Michaël Humbert.

« Raz-de-marée de haine »

Les prévenus, des hommes et des femmes âgés de 18 à 29 ans et originaires de toute la France, ont été renvoyés devant le tribunal par le parquet, dans le cadre d’une enquête du nouveau pôle national de lutte contre la haine en ligne. Ils ont été identifiés parmi les milliers d’auteurs qui ont adressé des messages de haine à Mila.

À la barre, ils ont en majorité reconnu être à l’origine des messages. « Qu’elle crève », « tu mérites de te faire égorger sale pute », « que quelqu’un lui broie le crâne par pitié », ont-ils notamment écrit en novembre 2020, en réponse à une nouvelle vidéo de Mila critiquant l’islam.

Mais ils ont en grande partie contesté avoir su que l’adolescente était la victime d’un harcèlement en ligne, et ainsi leur participation à un « raid » numérique. Pour le représentant du ministère public, les prévenus ne pouvaient l’ignorer, dix mois après une première vidéo de Mila devenue virale et le déferlement de haine qui s’en était suivi. L’adolescente, alors âgée de 16 ans et demi, avait en janvier 2020 répondu à des injures sur les réseaux sociaux sur son orientation sexuelle par le biais d’une vidéo véhémente sur l’islam mais « dans les strictes limites » de la liberté d’expression, avait rappelé le procureur. Cible d’un « raz-de-marée de haine », Mila a reçu selon son avocat Richard Malka « 100.000 messages » haineux. 

Article original publié sur BFMTV.com

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« On a gagné et on gagnera encore » : la réaction de Mila après la condamnation de 11 cyberharceleurs (VIDEO)

 Télé7Jours 

Ce 7 juillet, le tribunal de Paris a rendu son jugement dans l’affaire Mila. En tout, 11 prévenus ont écopé de peines de prison avec sursis. L’adolescente s’est exprimée à la sortie de l’audience.Ce 7 juillet, le tribunal de Paris a rendu son jugement dans l'affaire Mila. En tout, 11 prévenus ont écopé de peines de prison avec sursis. L'adolescente s'est exprimée à la sortie de l'audience.© BFM TV Ce 7 juillet, le tribunal de Paris a rendu son jugement dans l’affaire Mila. En tout, 11 prévenus ont écopé de peines de prison avec sursis. L’adolescente s’est exprimée à la sortie de l’audience.

« J’ai rien préparé de ce que j’allais dire… » La jeune Mila, qui avait reçu des milliers de messages de haine après une vidéo polémique sur l’islam postée sur les réseaux sociaux s’est réjoui du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris, ce mercredi 7 juillet.

Sur les 13 prévenus dans cette affaire de cyberharcèlement – des hommes et des femmes âgés de 18 à 29 ans et originaires de toute la France – 11 ont écopé de peines allant de 4 à 6 mois de prison avec sursis et 1500 euros d’amende, un autre a été relaxé, et enfin un dernier a bénéficié d’une nullité de la procédure.

Durant ce procès, les thèmes de la liberté d’expression, du droit au blasphème, et de la banalité du harcèlement en meute sur la Toile, ont été mis en lumière. Après l’annonce du verdict, Mila a expliqué devant les caméras de BFM TV : « je m’attendais à bien pire et honnêtement, on a gagné et on gagnera encore« .

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L’adolescente a remercié ses parents, son avocat, les forces de l’ordre, les féministes qui l’ont souvenu ainsi que les associations antiracistes qui se sont engagées. Elle a demandé : « ce que je veux c’est que tous ensemble, on arrête jamais de baisser les bras, qu’on continue de se battre ». Et d’ajouter : « ce que je veux c’est que les personnes qui seraient considérées comme des pestiférés, à qui on interdirait les réseaux sociaux, ce soient ceux qui harcèlent, qui privent de la liberté des gens ceux qui menacent de mort, ceux qui incitent au suicide, et je ne veux plus jamais qu’on fasse culpabiliser les victimes ».

Désormais déscolarisée, sans emploi et sous protection policière, en raison des menaces qui pèsent sur elle, Mila a conclu par une phrase de son livre tirée de son livre « Je suis le prix de votre liberté » : « force à nous« .

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Mila aux cotés de son avocat, Richard Malka, au tribunal judiciaire de Paris, ce mercredi 7 juillet. © Lafargue Raphael / ABACA

Mila, adolescente menacée de mort suite à ses propos sur l’Islam, s’était engagée dans un combat juridique contre ses détracteurs. À l’issue du procès, démarré le 3 juin dernier, le tribunal judiciaire de Paris a donné son verdict.  

Ce mercredi matin, à 9 heures, le tribunal judiciaire de Paris a rendu son verdict, qui clôt l’affaire Mila. Sur les treize jeunes prévenus – dont seulement sept étaient présents dans la salle, cinq garçons et deux filles –, onze ont été condamnés à des peines de 4 à 6 mois de prison avec sursis, dont un pour menace de mort, les autres pour harcèlement. Un non-lieu a été prononcé pour vice de procédure et seulement un seul des treize prévenus a été relaxé.  

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« ON A GAGNÉ » 

Mila, harcelée en ligne suite à ses propos polémiques sur l’Islam, avait dû changer de lycée. Au sortir du délibéré, elle s’est exprimée, remerciant ses parents pour « la force qu’ils ont eue jusqu’à présent ». Elle a mentionné le « calvaire » que ces derniers vivent alors « qu’ils n’ont rien demandé ». La jeune femme a également remercié son avocat Richard Malka pour sa « persévérance » et les forces de l’ordre qui ont assuré sa protection. La plaignante a aussi salué certaines associations féministes et anti-racistes pour le soutien qu’elles lui ont publiquement apporté.  

Concernant les peines prononcées, Mila a déclaré : « Je m’attendais à bien pire, mais on a gagné et on a gagnera encore. […] Je veux qu’on continue à se battre, je ne veux plus jamais qu’on fasse culpabiliser les victimes […] force à nous. »  

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Affaire Mila : ses harceleurs condamnés, elle réagit

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Ce mercredi, les harceleurs de Mila ont été condamnés à plusieurs mois de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Paris. L’adolescente originaire de la région lyonnaise a réagi.Affaire Mila : ses harceleurs condamnés, elle réagit© Capture d’écran TMC Affaire Mila : ses harceleurs condamnés, elle réagit

La vie de Mila a basculé en janvier 2020. À l’époque, l’adolescente originaire de la région lyonnaise est une lycéenne ordinaire âgée d’à peine 16 ans. Un jour, elle décide de faire un live sur son compte Instagram au cours duquel elle critique allègrement la religion musulmane. « Votre religion, c’est de la merde, votre Dieu, je lui mets un doigt dans le trou du cul, merci, au revoir », avait-elle déclaré, provoquant une polémique de grande ampleur. Mila a ensuite été placée sous protection policière et déscolarisée après avoir reçu des milliers de menaces de mort et de viol. Le 23 juin dernier, Mila a publié son livre intitulé « Je suis le prix de votre liberté » (éditions Grasset) dans lequel elle donne sa version de l’histoire.

Mila : « On a gagné et on gagnera encore »

Mercredi 7 juillet 2021, le tribunal de Paris a prononcé des peines allant de quatre à six mois de prison avec sursis contre onze personnes reconnues coupables d’avoir participé au cyberharcèlement de Mila. Chacun des condamnés devra également verser 1 500 euros de dommages et intérêts et 1 000 euros pour les frais de justice soit un total de 2 500 euros. Sur treize prévénus, un seul a été relaxé. Un non-lieu a également été prononcé pour vice de procédure. À la sortie de la salle d’audience, Mila a réagi : « Je remercie la police, mes avocats et tous ceux qui m’ont soutenus. Honnêtement on a gagné et on gagnera encore. Je veux plus jamais qu’on fasse culpabiliser les victimes ».

Affaire Mila : un jugement aux multiples enjeux dans la lutte contre le cyberharcèlement

Mila
La jeune Mila avait reçu des milliers de messages de haine et de menaces après une vidéo polémique sur l’Islam (Illustration). © Capture d’écran Quotidien.

Ce mercredi, le tribunal de Paris rend son jugement dans l’affaire Mila, premier dossier du nouveau pôle national de lutte contre la haine en ligne. Une décision attendue alors que le 22 juin dernier, le parquet avait requis des peines d’avertissement allant de 3 à 6 mois de prison avec sursis contre douze des prévenus. 

La décision est attendue ce mercredi matin au tribunal correctionnel de Paris dans le dossier Mila, cette jeune fille qui avait reçu des milliers de messages de haine et de menaces après une vidéo polémique sur l’Islam. Le tribunal de Paris rend donc son jugement concernant 13 jeunes jugés pour avoir participé au cyberharcèlement de l’adolescente. Le 22 juin dernier, le parquet avait requis des peines d’avertissement allant de 3 à 6 mois de prison avec sursis contre douze des prévenus et sollicité la relaxe d’un treizième. Une décision qui sera scrutée avec attention, car elle va donner le ton de la lutte contre les propos haineux en ligne. 

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Cette affaire Mila est en effet la première du nouveau pôle national de lutte contre la haine en ligne. Deux magistrats au sein du parquet de Paris sont en charge de 239 enquêtes, dont la dernière en date a été ouverte mardi après la publication de tweets racistes visant les Bleus et notamment Killian Mbappé, traité de « sale nègre » sur Twitter.

Une réponse unifiée sur tout le territoire

L’idée pour la justice est d’apporter une réponse unifiée et visible sur tout le territoire français. D’où l’enjeu autour de ce procès Mila, qui va servir d’étalon pour les affaires qui vont suivre. C’est aussi l’une des toutes premières audiences consacrées au cyberharcèlement, un délit passible de 2 ans de prison et de 30.000 euros d’amende.

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Avec la reconnaissance du principe du raid numérique, pas besoin de concertation entre les suspects. L’infraction est constituée dès lors qu’ils sont plusieurs à s’en prendre à la même victime. « Il y aura un avant et un après ce procès, avait prévenu le président à l’audience. Nous sommes en train de poser les règles de l’acceptable et de l’inacceptable ».

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Haine en ligne : Twitter condamné à dévoiler ses outils de modération, une décision importante ?

JUSTICE Le réseau social dispose désormais de deux mois pour communiquer des pièces détaillant tous les moyens mis en œuvre pour lutter contre les discours haineuxH.S. avec AFP

Twitter a désormais deux mois pour communiquer les pièces réclamées par la justice française.
Twitter a désormais deux mois pour communiquer les pièces réclamées par la justice française. — Paulo Amorim/Sipa USA/SIPA
  • Dans une décision rendue ce mardi, les juges des référés ont ordonné à Twitter de communiquer, dans un délai de deux mois, des documents détaillant ses moyens pour lutter contre la haine en ligne.
  • Six associations avaient assigné le réseau devant le tribunal judiciaire de Paris en mai 2020, estimant que l’entreprise manquait de façon « ancienne et persistante » à ses obligations en matière de modération.
  • L’entreprise dispose désormais de deux mois pour communiquer les pièces réclamées par les magistrats, mais peut toujours faire appel de cette décision.

« Les juges viennent de siffler la fin de la récréation ! », s’enthousiasme l’avocat de l’Union des étudiants Juifs de France (UEJF), Stéphane Lilti. Un an après le début du bras de fer entamé par six associations contre le réseau social Twitter, la justice française vient de rendre une décision inédite à l’égard de la plateforme. Racismeantisémitismehomophobie… : dans une décision rendue ce mardi, les juges des référés du tribunal judiciaire de Paris ont ordonné à Twitter de communiquer, dans un délai de deux mois, des documents détaillant ses moyens de lutte contre la haine en ligne.

SOS Racisme, l’Union des étudiants Juifs de France (UEJF) et SOS Homophobie et d’autres associations avaient assigné le réseau social devant le tribunal de Paris en mai 2020, estimant que l’entreprise manquait de façon « ancienne et persistante » à ses obligations de modération. Engagées dans une médiation qui a échoué, les parties s’étaient retrouvées devant le tribunal le 26 mai dernier. A l’audience, les associations avaient demandé en référé (une procédure en urgence) qu’une expertise soit ordonnée afin de dissiper « l’épais mystère » qui, selon elles, entoure la modération des contenus haineux sur Twitter.

  • Que demande la justice française à Twitter ?

Dans son ordonnance, le tribunal estime qu’il existe « des éléments de preuve établissant la réalité de nombreux messages racistes, homophobes et antisémites échangés sur le réseau d’informations Twitter avec des demandes de retrait non satisfaites promptement ». En conséquence, il a ordonné au groupe Twitter (et non à Twitter France) la communication de « tout document administratif, contractuel, technique ou commercial relatif aux moyens matériels et humains mis en œuvre » pour « lutter contre la diffusion des infractions d’apologie de crimes contre l’humanité, d’incitation à la haine raciale, à la haine à l’égard de personnes à raison de leur sexe ». En revanche, la demande d’expertise formulée par les six associations a été écartée par les magistrats.

L’entreprise devra toutefois, ajoute le tribunal, détailler « le nombre, la localisation, la nationalité, la langue des personnes affectées au traitement des signalements provenant des utilisateurs de la plate-forme française », « le nombre de signalements », « les critères et le nombre des retraits subséquents », ainsi que « le nombre d’informations transmises aux autorités publiques compétentes, en particulier au parquet ». Ces communications portent sur la période allant de l’assignation en justice, le 18 mai 2020, à la date de la décision ce mardi. La plateforme dispose de deux mois pour répondre au tribunal.

  • Pourquoi cette décision est-elle inédite ?

Les associations appuyaient leur demande sur la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) de 2004, qui impose aux plateformes de « concourir à la lutte » contre la haine en ligne et notamment de « rendre publics les moyens qu’elles consacrent à la lutte contre ces activités illicites ». Or, l’entreprise n’a jamais communiqué dans le détail les ressources allouées à cette mission. En 2019, la députée LREM Laetitia Avia, à l’origine d’une loi sur la lutte contre la haine en ligne (retoquée largement par le Conseil constitutionnel), confiait au Monde n’avoir « aucune info sur la façon dont Twitter s’organise ».https://www.ultimedia.com/deliver/generic/iframe/mdtk/01357940/src/mzrxrf/zone/1/showtitle/1?tagparam=category%3Dby-the-web%26subcategory%3Dby-the-web%2Creseaux_sociaux%2Ctwitter%2Cracisme%2Csos_racisme%2Cantisemitisme%2Ccyber_harcelement%2Chomophobie%2Cjustice

Contacté par 20 Minutes, l’avocat de l’UEJF et de SOS Homophobie explique : « Avec cette décision, le tribunal affirme la primauté de la loi française et rappelle sans ambiguïté à Twitter son obligation de respecter cette loi dès lors que le contenu publié sur sa plateforme cible le territoire français. » Et d’ajouter : « C’est la première fois que la justice sanctionne cette obligation de coopération des plateformes qui doivent concourir à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et l’homophobie. Et c’est la première fois qu’une décision judiciaire impose à un géant de l’Internet de dévoiler les coulisses de ses services de modération. »

  • Que peut répondre Twitter ?

Le réseau social a toujours la possibilité de faire appel. Par ailleurs, si cette décision n’a pas de caractère contraignant pour la plateforme, l’avocat Stéphane Lilti indique : « On dispose tout de même de plusieurs leviers d’action. Nous pouvons par exemple saisir le même tribunal pour demander une astreinte financière pour chaque jour de retard si Twitter refuse de nous communiquer les éléments demandés dans le temps imparti. » Mais la publication de telles pièces pourrait être préjudiciable au modèle économique du site, estime Me Lilti : « D’un côté, ils ont intérêt à répondre au tribunal pour ne pas ternir leur image et leur réputation. Mais ils ont un business model à protéger. Or, on le sait, ce modèle se nourrit de la polémique et de l’outrance, c’est la raison pour laquelle jusqu’ici, ils ont refusé d’évoluer sur la modération. »

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La justice française ordonne à Twitter de détailler ses moyens de lutte contre la haine en ligne

La société Twitter va devoir démontrer à la justice française qu'elle met les moyens nécessaires pour lutter contre la haine en ligne et les discriminations
L'avocat français Alain Jakubowicz, président d'honneur de la Licra, le 5 février 2020 à Paris

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La justice française ordonne à Twitter de détailler ses moyens de lutte contre la haine en ligne

La société Twitter va devoir démontrer à la justice française qu’elle met les moyens nécessaires pour lutter contre la haine en ligne et les discriminationsAnne LEC’HVIENmar. 6 juillet 2021, 4:49 PM

Une décision saluée comme un « grand pas » par des associations de lutte contre les discriminations: la justice française a ordonné mardi à Twitter de communiquer, dans un délai de deux mois, des documents détaillant ses moyens de lutte contre la haine en ligne.

SOS Racisme, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) et SOS Homophobie, entre autres, avaient assigné le réseau social devant le tribunal de Paris en mai 2020 en estimant que l’entreprise manquait de façon « ancienne et persistante » à ses obligations de modération.

Les parties se sont engagées dans une médiation qui a échoué et amené le dossier devant le tribunal le 26 mai.

A l’audience, les six associations avaient demandé en référé (procédure en urgence) qu’une expertise soit ordonnée afin de dissiper « l’épais mystère », selon elles, qui entoure la modération des contenus haineux sur Twitter et d’engager, par la suite, des poursuites contre le réseau social.

Dans sa décision mardi, le tribunal a écarté l’expertise mais ordonné à Twitter international la communication de « tout document administratif, contractuel, technique ou commercial relatif aux moyens matériels et humains mis en œuvre » pour « lutter contre la diffusion des infractions d’apologie de crimes contre l’humanité, d’incitation à la haine raciale, à la haine à l’égard de personnes à raison de leur sexe ».

La société devra aussi, ajoute le tribunal, détailler « le nombre, la localisation, la nationalité, la langue des personnes affectées au traitement des signalements provenant des utilisateurs de la plateforme française », « le nombre de signalements », « les critères et le nombre des retraits subséquents » ainsi que « le nombre d’informations transmises aux autorités publiques compétentes, en particulier au parquet ».

Ces communications portent sur la période allant de l’assignation en justice, le 18 mai 2020, à la date de la décision mardi.

Le réseau social, qui a la possibilité de faire appel, a dit à l’AFP étudier cette décision.

– « Chaos numérique » –

« Twitter s’est pleinement engagé tout au long de la procédure et a travaillé de concert avec les associations pour tenter de trouver un accord, notamment dans le cadre de la médiation », a assuré un porte-parole à l’AFP.

« Notre priorité absolue est d’assurer la sécurité des personnes utilisant notre plateforme », a-t-il ajouté, en précisant que l’entreprise s’était engagée « à construire un internet plus sûr, à lutter contre la haine en ligne et à améliorer la sérénité de la conversation publique ».

Les associations appuyaient leur demande sur la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) de 2004, qui impose aux plateformes de « concourir à la lutte » contre la haine en ligne et notamment de « rendre publics les moyens qu’elles consacrent à la lutte contre ces activités illicites ».

« On se réjouit que Twitter soit enfin condamné à rendre des comptes, c’est un grand pas vers la fin de l’impunité et la fin du chaos numérique », a salué Ilana Soskin, avocate de l’association J’accuse.

« Il était temps que la justice mette un pied dans la porte », s’est félicité l’avocat de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) et de SOS Homophobie, Stéphane Lilti. « C’est la première fois que la justice sanctionne cette obligation de coopération des plateformes qui doivent concourir à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et l’homophobie », a-t-il déclaré.

Alain Jakubowicz, président d’honneur de la Licra, a estimé que cette action des associations faisait « vraiment avancer, bouger les lignes » et que la justice avait levé « l’obstruction totale » de Twitter.

A l’audience, l’avocat de Twitter avait contesté la validité des données avancées par les associations et dénoncé une « ingérence dans la gestion d’une entreprise » allant contre la « liberté d’entreprendre ».

Dans son ordonnance, le tribunal estime qu’il « est versé aux débats des éléments de preuve établissant la réalité de nombreux messages racistes, homophobes et antisémites échangés sur le réseau d’informations Twitter avec des demandes de retrait non satisfaites promptement ».

Les associations avaient produit plusieurs constats d’huissiers datant de 2020 et 2021. Dans le plus récent, du 20 au 23 mai, « seuls 28 des 70 tweets haineux notifiés ont été retirés par Twitter au bout de quarante-huit heures », avaient-elles relevé.

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